Article publié par Hubert Bensoussan, sur
Franchiser, c’est transmettre un savoir-faire et assister un partenaire pendant toute la durée du contrat. Mais attention au droit de la franchise. Il exige l’indépendance des parties. Or il arrive que la frontière soit ténue entre l’aide classique du chef de réseau et la perte d’autonomie du franchisé. Gare à l’excès d’assistance !
Étonnant, car après tout, le franchiseur est un formateur avant tout. Le serait-il au rabais, sans pouvoir réellement maintenir une aide appropriée?… Comment sérieusement lui reprocher d’assister assidûment ses franchisés, alors que nous sommes là dans la genèse même de sa fonction et que nombre d’entre eux ont bien souvent besoin de recadrages ? Ces franchisés en demande ont d’ailleurs généré au sein des réseaux le poste d’ « animateur booster » pour ceux qui ne décollent pas ou s’essoufflent pour diverses raisons (notamment parce qu’ils ne respectent pas les consignes ou lorsque la concurrence est particulièrement rude).
Le « booster », un animateur vedette, se rend sur l’unité de vente pour une durée variable, un jour, un mois voire plus. Sa mission est large. Il procède à la commercialisation de produits du concept, contrôle son application à tous les niveaux et cible les carences de fonctionnement. Il dresse des rapports journaliers de son activité, utiles pour le débriefing ultérieur. En parallèle, il réalise une excellente formation pratique de l’ensemble de l’équipe du franchisé.
Pendant cette période, pour éviter l’ingérence, même si le « booster » est présumé sachant, le franchisé doit conserver la totale direction des opérations. Il est chez lui ! Tout comportement différent serait de nature à violer l’indépendance juridique du franchisé, ce dernier pouvant alors être considéré comme dirigé et non plus seulement comme assisté, et le Franchiseur comme abusant d’une situation dominante, voire même comme un employeur pur et simple…
Parfois, l’assistance du Franchiseur est financière. Situation potentiellement plus dangereuse pour lui. Il peut en effet lui être reproché de tenir le franchisé par la barbichette ; par la bourse. Il peut être taxé d’être le véritable décideur de l’entreprise franchisée, alors que celle-ci peut en perdre toute forme de créativité. Nuisible en toute hypothèse.
La Cour Administrative de Paris a statué sur un dossier où un Franchiseur de librairie a consenti à l’un de ses franchisés une aide globale de près de 64.000 euros. L’administration fiscale a considéré que preuve n’était pas rapportée que cette générosité ait procédé d’une « gestion normale de l’entreprise ». La Cour a rappelé que les abandons de créances ou subventions accordés par une entreprise au profit d’un tiers ne peuvent relever d’une gestion normale que s’il apparaît qu’en consentant de tels avantages l’entreprise a agi dans son propre intérêt. Le Franchiseur a soutenu qu’il était dans son propre intérêt commercial de « maintenir, face à la concurrence, l’un de ses points de vente et de sauvegarder son image ainsi que sa crédibilité, en évitant la disparition d’un Franchisé ». La Cour a considéré que les ventes du Franchisé n’étaient pas suffisamment significatives pour justifier la position du chef de réseau. Elle a confirmé la position de l’administration fiscale.
Le droit fiscal et le droit commercial peuvent se rejoindre. Une raison supplémentaire pour ne pas confondre transmission du savoir-faire et mise sous perfusion !