L’incompétence de mon Franchiseur a conduit ma société au dépôt de bilan. Le représentant des créanciers ne veut pas engager de procédure à son encontre. Or les règles régissant les procédures collectives lui réservent la qualité à agir. Puis-je engager une procédure contre le Franchiseur en ma seule qualité d’associé ?
Que le franchisé ait tort ou raison sur les fautes qu’il reproche au chef de réseau, la question est intéressante en ces temps de crise.
Ce type d’action peut avoir des conséquences lourdes.
En effet, imaginons – hypothèse d’école – une multinationale avec un millier d’associés qui serait contrainte au dépôt de bilan du fait d’une livraison en retard de produits essentiels. Les mille associés auraient donc la possibilité de se retourner contre le tiers pour voir réparer leur préjudice ?…
C’est sans doute pour éviter ce type de conséquences, que la jurisprudence exige des conditions strictes.
L’associé doit avoir subi un préjudice distinct de celui de la société.
Pour la Cour de cassation, les associés ne sont recevables dans leur action personnelle que s’ils justifient d’un préjudice personnel distinct du préjudice subi par la société. Les préjudices subis par des associés d’une société en liquidation, tenant à des pertes de valeur de leurs parts ne sont que le corollaire de celui causé à la société et n’ont aucun caractère personnel (28 juin 2005).
Le 13 mars 2007 la haute Cour confirme en mettant l’accent sur la nécessité d’un lien de causalité. En l’espèce une société a été jugée recevable à agir en responsabilité contre une banque pour rupture abusive de concours avant l’ouverture de la procédure collective. Les associés demandent réparation de leur préjudice personnel. Les premiers juges leur donnent raison en raison de la vente imposée par un banquier, d’une maison d’un associé du fait du non remboursement d’un crédit personnel ayant servi à financer la société.
L’arrêt fut cassé en l’absence de démonstration d’un préjudice distinct découlant pour les associés de la rupture des concours bancaires consentis à la société.
Une notion de préjudice distinct difficile à apprécier.
Les actions des associés ayant abouti sont rares. La Cour d’appel de Toulouse a retenu en 1995 la responsabilité du franchiseur qui a manqué à son obligation précontractuelle d’information envers l’associé caution du franchisé au motif que le franchisé a quitté sa région d’origine et perdu son emploi, sans pour autant percevoir des indemnités de chômage. Cette décision n’a pas été soumise au contrôle de la Cour de Cassation. Il eut été intéressant de connaître son avis car est-ce vraiment là un préjudice distinct, les juges ne devaient-ils pas se positionner à partir du démarrage de la société sans aller tenir compte de la vie antérieure des associés ?…
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La mise en pratique de l’action personnelle des associés est très largement limitée par la double nécessité d’un préjudice distinct et d’un lien de causalité entre ce préjudice et la faute contractuelle du franchiseur.
Si, comme cela sera souvent le cas, il ne peut justifier d’un préjudice distinct de celui de la société, l’associé doit convaincre le représentant des créanciers d’engager une action sociale, tâche ardue. Dès lors, face à un mauvais Franchiseur (heureusement, ils sont de plus en plus rares), mieux vaut ne pas attendre la chute et trouver une solution amiable pour quitter au plus vite le navire défaillant !